Une adaptation de la 1ère partie par JMB

Une planche de Lina Chelli

Lumière et initiation

J’ai quitté cette nuit le monde du profane pour rejoindre un ailleurs qui a changé ma vie. Quand j’ai ouvert les yeux, j’étais entourée par des hommes et des femmes bizarrement vêtus. Ils brandissaient vers moi une épée menaçante et tentaient de cacher leur visage figé. J’étais un peu groggy. L’impact de la Lumière avait modifié en moi ce petit quelque chose que je n’arrivais pas encore à définir. Je les ai regardés avec des yeux hagards, et, lorsqu’ils ont baissé leur garde en souriant, je n’ai pu contenir l’émotion débordante qui rougissait mon âme.

Quel est cet ennemi que je devrais reconnaître, et à qui je devrais accorder mon pardon ?

Je n’en connaissais aucun. J’ai regardé pourtant tous ces gens qui m’entouraient, et rien, personne. J’ai réfléchi en vain, je ne le reconnaissais pas. Je n’ai jamais haï, ni blâmé mon semblable. Qui était-il enfin pour être derrière moi ?

Le choc fut transcendant, il transperça mon cœur quand je vis ce miroir qui m’accusait moi-même.

L’émotion m’a submergée, la Lumière est entrée doublement dans mon âme, j’étais cet ennemi, celui que j’ai parfois haï et combattu, celui-là même, et avec qui, malgré moi, je devais me réconcilier.

Je n’osais plus alors me retourner encore, mais, tel un automate, j’ai obéi sans comprendre. Une vive émotion a brouillé mon regard quand j’ai vu le sourire de mon parrain qui me réconforta bien fort dans ses bras chaleureux.

La suite était magique.

De mes trois premiers pas, je ne comprenais rien. Je me laissais guider avec docilité. Mais, lorsque des gants blancs ont recouvert mes mains nues et quand, d’un tablier, je fus enfin vêtue, alors, j’ai vraiment réalisé que, plus jamais, je ne serai la même.

J’étais une initiée. On m’a donné la Lumière, mais avec le temps, j’ai finalement compris que ce n’était qu’un début, et que, ce que j’avais reçu, il me fallait maintenant l’intégrer en moi.  Oui, cette Lumière, je l’ai reçue, mais l’initiation n’a fait que la révéler.

Je l’ai re-su

Car on l’a libérée de mon être, pourtant, à ce moment précis, je l’ignorais encore. J’ai donc re-su cette Lumière, comme vous tous ici présents, même si, pour chacun d’entre nous, ce fut une expérience différente et unique, car son ressenti dépend de notre vécu, de notre propre perception, et de notre propre sensibilité.

On m’a dit que j’étais une profane plongée dans les Ténèbres.

On a recréé cet état avec un bandeau sur mes yeux, on m’a privée d’un de mes sens, la vue, mais dans le même temps, on a empêché mes quatre autres sens de se décupler.

Des bruits m’ont étourdie, des voyages m’ont déstabilisée, on m’a fait perdre mes repères pour mieux intensifier le choc émotionnel de l’instant où cette Lumière reçue m’a transformée de façon brutale, intense et définitive.

Pour moi, ce fut le début d’une autre vie. Ce testament que j’ai fait, ce guide qui m’a conduit, cette terre dont je suis issue, cet air, ce souffle divin qui m’a créée, cette eau qui m’a régénérée et ce feu qui m’a purifiée, ont intensifié la dimension de cette Lumière par une transformation irréversible à l’intérieur de moi.

Mais peut-on donner une dimension à la Lumière ?

Non, car elle est. Tout simplement, sans avoir à lui donner une dimension. Toute comme la Foi, on l’a, ou on ne l’a pas.

On l’a, ou on la découvre, on en est touché, mais quoi qu’il advienne, cette Foi est en nous, tout comme la Lumière.

On dit souvent à la Lumière de la Foi. La Foi est Lumière.

Nous la retrouvons, elle est en nous.

Parler de la Lumière, c’est déjà la réduire. Donc, je ne vais pas la définir, je vais juste vous faire partager mon impossible quête de pouvoir un jour l’atteindre. Car :

Suivre la Lumière, c’est ouvrir les yeux vers une autre direction, celle de notre but.

Être touché par la Lumière, c’est redécouvrir son moi profond.

Être dans la Lumière, c’est être en accord avec lui.

C’est quand on arrive à ce que l’on croit être le sommet que l’on commence à monter.

Personne ne peut monter s’il n’a pas commencé à redescendre.

Mais, on ne bâtit pas sa montagne en prenant la terre d’autrui, on creuse son propre trou.

 

Recevoir la Lumière, oui, mais encore ?

Comment parler d’un instant qui n’appartient qu’à celui qui l’a vécu et qui est différent pour chacun d’entre nous ? Car :

L’initiation transforme de l’intérieur, elle se vit, elle ne s’explique pas.

(D’où le secret maçonnique).

Elle s’adresse à l’être primordial qui est en nous, et qu’elle nous fait redécouvrir. Cette Lumière, on va l’acquérir petit à petit, jusqu’à ce qu’elle devienne évidente, et qu’elle rejoigne celle de notre fort intérieur, c’est lui qui va la révéler.

Mais, qu’allons-nous en faire ?

Nous avons un devoir de Transmission.

Nous avons reçu la Lumière et nous devons la transmettre, dans, et en dehors du Temple.

C’est plus qu’une seconde naissance, c’est une seconde mort.

C’est un autre état de conscience qui va nous permettre de vivre pleinement cette seconde naissance.

Car, peut-être, qu’à force de travail et d’introspection, nous pourrons un jour retrouver notre véritable Lumière, celle qui est enfouie au plus profond de nous-mêmes. Celle qui va nous permettre de bâtir notre propre Temple intérieur, ce Temple de Lumière, celui de notre Humanité.

Et pour cela, il faut sentir son esprit progresser de l’extérieur vers l’intérieur, il faut entamer le chemin vers la conscience de son moi, à la découverte de son soi. 

 

Lumière, symbole de l’infini

On la reçoit, mais on doit la chercher toute notre vie, car cette Lumière est la Vérité, celle qui est notre but ultime.

Le chemin pour l’atteindre est la Lumière.

Elle doit s’extraire des ténèbres. [Cabinet de réflexion]

C’est pourquoi l’apprenti est placé sur la colonne du nord, comme dans le mythe de la caverne de Platon. Il ne peut encore recevoir une trop grande Lumière, il en serait ébloui, il faut qu’il s’y habitue petit à petit avec l’aide de son guide.

Il est sous le signe de la Lune qui lui reflète la Lumière du soleil.          Ce Soleil qui n’est lui-même que le reflet de la Lumière, celui du miroir du GADLU.

Cette rupture brutale avec sa vie antérieure le met sur le chemin d’une réalité différente.

Sa perception de la Lumière est limitée, mais la Lumière elle-même ne peut être limitée, elle est l’infini, seul l’accès à son reflet peut être limité.

Cette Lumière est en nous, c’est par un apprentissage graduel de la symbolique qu’elle va se révéler en nous.

C’est donc une lente progression qui va nous ouvrir la voie de la connaissance.

Car, la Lumière, c’est aussi le Verbe, c’est l’Esprit, c’est le Big Bang, c’est la genèse de la vie.

La rencontre avec l’Incréé, avec la Parole divine.

Le silence de la Colonne du nord nous permet de mieux écouter notre âme afin d’accueillir cette Lumière et de faire alliance avec le divin. Il nous donne accès à un niveau supérieur de conscience pour saisir le reflet de cette vraie Lumière et entamer notre chemin vers la Vérité.

Nous avons frappé à la porte du temple, parce que nous étions dans les ténèbres et que nous voulions recevoir la Lumière.

Mais, pour la recevoir, il faut qu’elle pénètre dans notre part d’obscurité pour la dissoudre et émerger d’elle.

C’est pourquoi, avant tout, il faut commencer par sa propre introspection, (fil à plomb), descendre à l’intérieur de soi, pour y faire jaillir cette Lumière re-sue lors de notre initiation.

Cette Lumière primordiale a la couleur de l’Amour, celle des mystères de la création.

Elle se répand sans limites, car elle prend naissance dans les profondes Ténèbres.

Mais elle ne peut exister en nous sans porter en elle une part d’obscurité, cette part d’obscurité que nous devons sans cesse vaincre afin qu’elle ne pollue plus notre propre Lumière.

On doit maîtriser notre égo, sans pour autant y renoncer, mais si cette Lumière nous éclaire, tout comme la Bougie nous a éclairés dans le cabinet de réflexion, alors,  nous pourrons atteindre un juste et parfait équilibre.

Durant notre initiation, on nous a donné un accès vers la Lumière, il nous faut maintenant la conquérir.

Á nous de nous diriger vers elle, et d’y trouver notre place.

Car cet apprentissage, augmenté par notre vécu, nous permettra d’aller encore plus loin, c’est-à-dire, de dépasser le chemin de notre moi, pour découvrir celui de notre soi.

C’est une lutte constante entre ce que nous sommes et ce que nous pouvons être, à l’intérieur et à l’extérieur de notre corps. Mais, ce combat, il faut le livrer en toute humilité, afin de nous élever au-dessus de notre conscience. Le but n’est pas d’essayer d’être meilleur que les autres, non, la finalité de notre recherche est d’essayer d’être meilleur que nous-mêmes. Nous devons nous dépouiller de nos métaux (égo, intolérance, racisme, dogmes, etc.…), et ceci par un abandon progressif des éclats de notre pierre brute.

Jusqu’à ce qu’on se trace en un cercle parfait,

Il faut, de nos erreurs, profiter des bienfaits.

Si nous y parvenons, alors, ces éclats disparaîtront en s’amalgamant de façon bénéfique à la taille sans fin de notre Pierre Brute.

Ce travail personnel est déjà un premier petit pas entrepris sur le chemin de l’Art Royal.

Mais, si l’on veut poursuivre notre cheminement vers la Lumière, il faut réussir à arracher le masque de nos préjugés, celui qui nous éloigne du but de notre quête initiatique.

Nous parlons ici de la Lumière, mais d’autres parlent de vraie Lumière, alors, comment ne pas réfléchir et tenter d’y apporter un petit éclairage sans parler de l’évangile selon Saint Jean.

Chapitre 1, verset 32 :

J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe, et il demeura sur lui

Chapitre 3, verset 21

Mais celui qui agit conformément à la Vérité vient à la Lumière, afin qu’il soit évident que ce qu’il a fait, il l’a fait en Dieu.

De même, lorsque Jésus rend la vue à un aveugle de naissance.

Chapitre 9, verset 5, 6  et 7

5 Aussi longtemps que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde. »

06 Cela dit, il cracha à terre et, avec la salive, il fit de la boue ; puis il appliqua la boue sur les yeux de l’aveugle,

07 et lui dit : « Va te laver à la piscine de Siloé » – ce nom se traduit : Envoyé. L’aveugle y alla donc, et il se lava ; quand il revint, il voyait.

 

Jésus a fait un travail, (le jour du Shabbat, ce qui lui sera d’ailleurs reproché). Il a fait ce travail pour donner la Lumière à un homme qui était plongé dans les Ténèbres.

Mais, cet homme, qui l’a reçue, a dû, lui aussi, et tout seul, faire un autre travail, un travail sur lui-même, celui d’aller se laver.

Cette Lumière se mérite.

Les FF. et les SS. qui ont donné la Lumière à l’initié ont fait leur part, c’est maintenant à ce nouveau maillon de faire la sienne, tout comme cet homme, qui a recouvré la vue.

Cette vraie lumière, celle qu’ont reçue et transmise les grands Élus (Abraham, Moise,  Jacob, le Christ etc. …)

Mais nous, pauvres mortels, nous n’avons que le reflet de cette Lumière, car nous en serions éblouis et nous en perdrions certainement la vue. Mais, par bonheur, en plus de la Foi et de la Charité, nous avons l’Espérance, celle de l’atteindre un jour.

Donc, la Lumière, oui, mais de façon progressive, afin d’essayer d’atteindre la vraie Lumière, la Vérité, ce qui, bien entendu, est bien plus qu’un but, ou une fin en soi, c’est le début d’autre chose, c’est la quête ultime d’un parcours entrepris vers un Art Royal qui s’ouvre devant tout initié.

Ce profane est venu chercher la Lumière, nous la lui avons donnée. Maintenant, c’est à lui, et à lui seul, de la trouver, avec l’aide de tous ses FF. et SS. certes, mais en finalité, c’est dans le profond silence de son introspection, c’est dans la rigueur et la continuité de son travail, qu’il devra se diriger. Car, dans le juste et parfait chemin qui s’ouvre devant lui, il conserve son libre arbitre, c’est lui qui lui donnera la clef pour ouvrir la porte du labyrinthe de sa progression.

Je tiens à préciser que ces quelques réflexions ne sont que le fruit de mon esprit un peu fêlé, et tant mieux, car ainsi, il pourra (peut-être) laisser passer un peu de Lumière. Je respecte trop les textes sacrés pour me permettre d’en faire une quelconque interprétation.

C’est juste une approche symbolique, et ici, tout est symbole.

 

Il y aurait tant de choses à ajouter à ces humbles réflexions, mais, grâce à votre aide, vous tous mes FF. et mes SS., vous allez très certainement m’éclairer par la Lumière de vos interventions.

J’ai dit.

Lina Chelli